Je ne retiens pas mes mots comme on retiendrait une envie de pisser. Non, dès que j’ai envie, même un tout petit peu, je jette quelques signes. Alors ça donne comme une avalanche de textes plus ou moins sans intérêt qui se succèdent et se superposent. On ne s’y attarde plus. On y plonge un peu comme on plonge son regard dans le lointain de l’océan quand on est au milieu du vide. Putain comme jsuis pressée d’y retourner… J’adore hein, ici. Mais l’océan…

Y’a les grands voyageurs qui resteront toujours insaisissables. Et t’aimes te dire que t’as un peu d’eux au fond du ventre. Que ses régates t’y étais un peu en pensée, et puis que de toute façon t’as encore plein de temps pour ça. Oui, l’océan. Tu n’as jamais pensé que ça te manquerait comme ça, que ça t’appellerait en résonnant du plus profond du ventre jusqu’au creux de l’oreille – là où c’est bon, là où naissent les frissons.

Tu ne sais pas trop ce que t’as avec les ventres, ces derniers jours. Peut être que c’est le manque de sport, le manque de sexe, le manque de tous ces trucs là qui font que le tien se ramollit (la faute aux JO t'façon, ça c'est sûr). C’est pas très sexy dit comme ça, mais en vrai, il est mignon le tien – au moins un peu mignon. Et puis c’est l’hiver, merde. Comment tu pourrais arrêter de greloter sans ça ? Jvous le demande moi ! (le régime crêpes, ptit dej au nutella, tartiflette et les envies de fondue n’arrangent certainement rien, mais t’es gourmande, c’est comme ça, et t’assumes parfaitement.)

Il y a des trucs en avance, et c’est toujours mieux en avance qu’en retard, c’est ce qu’on dit. Mais entre le 0,01% et le calme plat, ça ne risque pas de t’arriver et c’est pas de ça que tu t’inquiètes. C’est quand même étrange.

T’as fait un rêve cette nuit. Un rêve d’un hôtel de barge de Dubaï réinterprété par le songe. Dans la réalité il y a une suite qui donne sur un immense aquarium avec des requins et tout – le truc qui t’empêcherait de dormir tellement ils sont proches, et puis si t’avais ça dans ta chambre tu passerais ton temps à observer plutôt qu’à dormir. Mais là dans le rêve, c’était un espace complètement tripé, en fait l’hôtel était dans la mer, on était au milieu des profondeurs mais bien au sec, et puis on voyait les raies qui venaient par groupes, et puis les lamantins, mais tous se baladaient par espèces. C’était énorme. Un peu magique. Tu ne te rappelles plus avec qui tu y étais, mais il y avait ces bras qui te serraient et la douceur ; non tu n’étais pas seule, mais y’avait que la douceur, ça aurait pu être avec ton frère. C’est qu’il me manque ce con là aussi. Pas fan de noël, mais quand même, rien que pour ça et le foie gras, ça déchire.

T’aimerais arrêter de te dissoudre. T’aimerais aimer comme dans un roman. Tu lis ses mots à elle, toi aussi t’aimerais pouvoir dire que vous étiez fracassants, que vous n’étiez plus humains. Oui, tu voudrais vivre ça. Dépasser ta propre condition. Ne plus faire de promesses puisque tu n’y crois plus de toute façon, non, plus de promesses. Tu ne veux plus non plus du réconfort de l’instant, même si c’est doux de dormir entre ses bras – tu te vois, te ramener avec ton ours en peluche sous les draps qu’il remonte sur ton épaule..? Alors oui, c’est agréable, oui, mais ça n’ira pas plus loin, pas comme ça et pas maintenant. Pour elle et puis pour lui, même si t'aimerais bien lui arracher le coeur - pas pour lui faire mal, juste pour qu'il baisse un peu les yeux, qu'il descende de son bad trip parce là, là vraiment tu pars en couille mec, et tu saisis pas tes chances. Juste pour qu'il se souvienne, un peu.

Il y a ce type là qui te dit au milieu de la soirée regarde y’a que des mecs ici on va pouvoir s’en mettre plein. Alors tu lui réponds ah bon t’es intéressé toi ? Détourner ses sous entendus minables, parce que, vraiment. Quel con. Il prête attention aux rumeurs, oui parce que c’est la rumeur qui gronde, je ne suis qu’une allumeuse je vous l’ai déjà dit. Et surtout il y a eux et eux les deux P qui s’évadent sur un lit en se moquant des regards, et puis elles, qui te font des bisous juste en passant, elles qui te serrent fort. T’aimerais pouvoir leur semer du bonheur, et y’en a une qui commence à le trouver, tu crois, t’espères. Celui là c’est pas un tocard, garde-le. Profite du moment et arrête de projeter sur l’avenir, laisse les questions sans réponse où elles sont et saisis l’instant, il te rend belle et tu l’mérites.

Allez quoi, jvoudrais un bout de rêve moi. Une histoire de fou. Un truc de barge. Perdre le sens, oublier la raison, retourner mes habitudes. Inverser les repères et tenter l’idéal, goûter un morceau d’absolu. Mais comme il dit « Tu crois que Wendy a direct volé tranquille avec Peter Pan ? Tu crois qu'Aladdin a chopé Yasmine juste en se la jouant mendiant d'amour ? ».

Ouais, vas-y envoie du rêve, du gros, du lourd. Balance du son. Tu sais pas pour quoi t’es faite mais tu sais pour quoi tu ne l’es pas, et l’inactivité du moment t’enlise et t’en peux plus. Alors invente-toi un songe. Invite-toi à l'idéal et croque dedans sans demander la permission. Pars à la conquête de l'impossible, arrête d'attendre et prends, tu t'en fous des conséquences, toi t'as rien à perdre. Saisis-le ton improbable.

Prends-toi des bains de champ', avec les bougies qui vacillent et dorent la peau. Offre-toi la grande classe. Saisis ton idéal.