Mon absent s’est dégoté une absente.
(Et tu sais que, même, sur FB, elle dit qu’elle est en couple.)
Il me dit que je suis chiante, enfin, plutôt, exigeante. Il me parle d’angoisses et d’efficacité, et tout ce que j’arrive à comprendre, c’est qu’il a perdu ce côté solaire. Et que sa fatigue, et que, et que.
Mon absent est là, en face de moi, et si j’ai envie de le toucher, c’est pour vivre à nouveau cette pub pour du fromage avec le sourire bright. Il me dit il y a un an on était ensemble. Ouais, y’a un an, on était ensemble, et l’année d’avant, et celle encore d’avant aussi. Lui et moi, on était intouchables. Touchés, coulés, mais intouchables.
On avait quelque chose d’irréel. Quelque chose de plus grand que nous.
Et puis. Aujourd’hui. Elle a des vacances et. Et il dit que ça sera plus compliqué. Qu’elle est pleine d’énergie et difficile à suivre. Moi j’ai jamais eu des vacances avec lui, et il a jamais vu que le côté obscur.
Peu importe.
J’ai juste compris que.
Que lui et moi on était plus que ce que n’importe
lequel de nous deux sera avec quelqu’un d’autre. Que les choses seront
différentes. Et que, si je ressens toujours pour lui cette profonde attirance,
c’est lié à quelque chose de magnétique et d’incertain. Et que cette part
d’incertitude est enivrante.
Et c’est bon de le voir, et j’aurais aimé le serrer dans mes bras mais. Mais les é-preuves d’affection. Ouais, alors j’lui dis que j’le déteste et que, merde, j’suis pas chiante.
Son absente à lui, elle est pétillante et j’l’aime
bien. Alors. J’ressens pas de la jalousie, ni des regrets, juste une certaine
nostalgie de ce qui a été et qui n’est plus. Les souvenirs qui s’accrochent et
qui forment une nébuleuse, proche, trop proche.
J’me rappelle que ça, ce côté inhumain, en décalage,
au-delà. Loin des ancrages au réel et de toute notion d’emploi du temps.
J’comprends que c’est ça aussi notre absence de projets communs.
J'lui raconte moi, et. Il me dit passe à autre chose, et j’sais déjà qu’il a raison. Passe à autre chose. Alors.
Alors oui, trouver quelque part l’énergie de. D’y prendre goût. De rompre.
La vérité, c’est que je me suis trompée de bonhomme. Que comme toujours je me suis précipitée dans une histoire pour avoir quelque chose à vivre, alors que. Que maintenant, je sais que j’ai fait une erreur. Que mon absent et moi, on se ressemble plus qu’à bien vouloir l’admettre, et que. Et que si je tourne autour du pot, c’est parce que c’est une histoire compliquée.
En réalité, je ne partage pas ma vie avec la bonne
personne ; je ne sais pas s’il existe une bonne personne, mais tout ce que
je sais, c’est que, actuellement, je.
Mon absent, ou tout au moins le souvenir de mon absent porte le feu. Et j’ai besoin de pouvoir me projeter dans ce genre de rêves, dans ce type de folie. J’ai besoin de quelqu’un qui rêve avec moi, quelqu’un avec une énergie débordante et des envies qui font vibrer.
Et. Et c’est pas une question de jugement, juste que.
Que lui, il ne me fait pas rêver, pas vibrer. C’est qu’une question d’état
d’esprit, de mode de vie, de.
De pouvoir se dire demain on écrit les histoires de
non-non, le jumeau dark de oui-oui, mais il aurait la même voiture jaune.
De pouvoir se dire j’veux aller planer là bas, et puis j’irai à tel endroit et encore à tel autre, et ce week end et si on faisait ça, et si, et si. Et déborder d’envie, d’ambitions, d’énergie. De projets à la con comme partir toujours plus à l’Est avec un sac sur le dos. De se faire la côte croate à pieds, avec un budget trop serré mais le sourire aux lèvres. D’aller tutoyer le ciel et compter combien de temps on tient sur la route 66. De se suspendre à un fil et de savourer l’être seul au monde. Parce que ça, c’est moi, et que j’me sens plus tellement moi-même à être autant caméléon, réactive aux moindres désirs de l’autre, me métamorphosant toujours un peu plus en ce qu’il attend.
La vérité, c’est que. Que je suis avec quelqu’un alors que c’est un autre qui me rappelle, de loin, de loin mais trop proche, qui je suis, qui je veux être, et quelle est la vie qui me ressemble.
Et j’voudrais au moins lui dire, merci d’être là, là mais loin, même si j’te connais presque pas mais. J’voudrais juste lui dire, merci, et j’ai peur que ça brise un équilibre, et j’ai peur d’avoir, encore une fois, trop projeté, trop imaginé les regards qui se croisent et se posent.
Version XML