J’me dis toujours que si on veut suffisamment fort, on finit par obtenir.

Mais.

Y’a quand même un mais un peu énorme, c’est que sa ptite amie, en plus d’être très jolie etc, elle est drôle et cultivée, touche à tout et certainement chiante comme une vraie fille, mais surtout, elle a les mêmes opinions que lui. Et elle a un avis sur tout. La musique, les films, la politique, les livres, la mode. Ah tiens, et même l’architecture. Tout. Ce qui peut être finalement super chiant, j’dis pas, mais quand même.

J’me dis, lâche l’affaire meuf.

Parce que tu soutiens pas la comparaison, pas une seconde.

Parce que même si tout ça, ben... c’est pas non plus le mec de l’année ni rien, mais euh. Mais en vrai, j’crois que je comprends. A côté de ça, j’dois être méga reposante. Parce que même si jdis toujours que je suis vindicative etc, en vrai, j’suis plutôt douce et à profiter des moments de paix. Et lui et moi, on partage que des moments de paix.

Et voilà et je sais qu’elle et lui enfin, voilà. Pas moi quoi.

Le garçon virtuel, il m’a l’air pas sûr de lui. Dans le genre il me dit j’regrette de pas t’avoir embrassée et puis, il rappelle super longtemps après, parce que je lui ai demandé si c’était du bluff ou bien. J’lui avais dit on peut se voir cet aprem, et il devait m’appeler. Il a envoyé un sms pour donner le point de rendez vous le plus bateau que je connaisse ici, et ça m’a énervée, alors j’l’ai envoyé chier en disant que j’aurais cru que ça lui avait pris tout ce temps d’avoir un peu d’imagination, que du coup j’allais faire autre chose. Depuis il sms qu’il en peut plus et il laisse des messages sur le répondeur en disant je veux vraiment te revoir.

Le voisin, j’ai coupé court. A la fois trop envahissant et trop. Enfin. Trop quoi. Après l’avoir pourtant évincé par téléphone et voyant qu’il n’y entendait rien, j’lui ai écrit.

Je sais plus trop comment m’y prendre, avec toi.

La fidélité, ça dépend du souriceau, ouais. Mais ça dépend du souriceau, à mon âge. Tant que j’ai encore rien construit. Tant que j’ai pas encore fait le choix de me jeter à l’eau et de m’engager un peu plus avec quelqu’un.

Tu vois, ce que j’essaie de te dire, c’est que j’veux pas de ça. De cette histoire improbable et qui me rend nauséeuse rien que d’y penser. Tu auras beau me dire que ça arrive tous les jours et sans doute beaucoup plus souvent que je ne l’imagine. Mais. Mais j’ai 23 ans et c’est triste, de commencer par voir l’autre côté du miroir. C’est triste, de me dire que le jour où je serai en couple, avec des enfants, mon mec ira se taper la voisine.

Tu me parles de possibles et moi tout ce que je vois, c’est que ce sont mes futurs possibles que je détruis. Que tu détruis. Parce qu’entre mon histoire familiale et toi, tout ce que je vois c’est que vous êtes des lâches et des salauds. Tous. Alors bien sûr le prince charmant ça c’est bon, j’y crois plus. Mais seulement, croire à la possibilité d’une relation saine, ça me parait nécessaire.

Tu veux aller voir ailleurs et t’as l’air assez raccord avec toi-même pour le vivre bien, c’est très bien. Mais compte pas sur moi. Parce qu’honnêtement hein, moi j’y gagne rien, dans l’histoire. Qu’est ce que tu me proposes ? De venir faire l’amour chez moi, un étage en dessous de chez toi, et puis de repartir comme t’es venu ? De m’inviter à m’allonger dans la poussière d’un de tes chantiers ?.. J’ai pas envie de ça. Tout ce que je gagne dans cette histoire, moi, c’est de me détester un peu plus, de ne pas supporter de me regarder dans un miroir parce que, si toi ça ne te dérange pas de tromper ta femme, moi ça me dérange. Ca me dérange parce que dans quelques temps, ça pourrait être moi. Ca me dérange parce qu’elle, à la différence de moi, elle doit ressentir quelque chose pour toi, et que c’est moche de blesser quelqu’un pour une histoire de cul. Parce que tu sais, c’est toi qui l’as dit, au tout début, ça n’est qu’une histoire de sexe. Et si ça n’est réellement qu’une histoire de sexe, j’ai pas besoin de toi. Et que tu ne comprennes pas que ça n’est pas une question de féminisme mais seulement une question de respect de moi-même, au nom d’un idéal débile peut-être, ça me fait fuir encore un peu plus vite.

Alors arrête maintenant. Arrête d’insister. Ni pour un café ni pour quoi que ce soit.

Parce que je mérite mieux que ça. Je mérite quelqu’un qui ne me verrait pas en cachette et qui m’accompagnerait au cinéma, avec qui regarder des matchs de foot en buvant des bières ou inviter cinquante potes. Je mérite quelqu’un qui, s’il n’est pas idéal, si notre relation est imparfaite, quelqu’un qui serait là pour moi malgré tout. Quelqu’un que je pourrais appeler au milieu de la nuit quand ça ne va pas, quelqu’un qui saurait me rassurer. Et des types gentils qui veulent prendre soin de moi, y’en a. Et tu n’en fais pas partie. Parce que si c’était le cas, tu entendrais ce que j’essaie de te dire. Je mérite quelqu’un qui respecte les gens qui comptent pour lui. Et qui soit capable de comprendre, quand je dis STOP, que c’est terminé.

Bon vent.

Alors voilà. J’ai fait le tri. Un tri salutaire, peut être. Mais tout ce que je vois, c’est que j’voudrais pouvoir être avec lui, là maintenant. A parler de rien. A seulement le laisser m’embrasser en buvant une bière, sans se demander pour demain ou ce soir, ce qui adviendra. Parce qu’en fait, avec lui, j’ai toujours baissé les armes. Parce que lui, j’ai jamais eu peur qu’il me blesse ; parce que lui, ben il est toujours là, toujours. Et qu’on a toujours joué cartes sur table.

Alors j’vais même pas essayer de m’immiscer dans son univers. Parce que c’est lui, et parce que c’est moi. Et qu’il compte.