Son odeur s’est sans doute imprégnée dans mes draps, j’ai pensé toute la journée ; son odeur s’est certainement imprégnée dans mes draps et je ne sais qu’en faire, de cette idée qui s’attache. Je me suis surprise dans la journée à le sentir, tout d’un coup, sur ma peau, dans mes cheveux, d’un coup c’était à nouveau ses mains qui recouvraient mon corps et sa bouche qui venait chercher mes lèvres.
J’ai pensé surtout à cette règle idiote que je croyais tenable, de ne jamais jamais le laisser partager mon chez-moi, de ne pas l’intégrer à mon quotidien. Je ne connais que trop bien les images que je peux me projeter à partir de rien, je ne connais que trop bien l’odeur qu’on inspire en s’endormant et qui devient enivrante comme les philtres légendaires.
Et puis, c’est toute
cette tendresse. On a fait l’amour tendre et c’était doux ; mais
complètement étranger. Etranger à ce que l’on s’est prévu d’être, étranger quoi ?
Je me suis demandé à partir de quand est ce qu’on sent que tout bascule, où est
le point limite qui fait que. Je me suis demandé pourquoi on avait été si doux,
pourquoi il y a eu d’un coup toute cette rondeur ; qu’est ce qui a fait qu’on
est passé du purement sexuel au très tendre. J’ai senti une intense générosité
dans nos rapports et cette volonté du plaisir de l’autre ; et quand je lis
le plaisir sur son visage je ne veux pour rien au monde être ailleurs. J’me rappelle avoir pensé c’est la première
fois que je fais l’amour dans ce lit, et je ne suis même pas complètement sûre que
ça soit vrai : je me souviens juste de cette pensée-là à ce moment-là,
alors j’imagine que c’est au moins subjectivement réel.
C’est bizarre d’écrire ‘subjectivement réel’.
J’ai l’impression d’être différente. D’être plus ‘connectée’ avec mes sens. C’est étrange, comme si tout était ressenti de façon nouvelle. J’ai envie de danser quand je me colle mon baladeur dans les oreilles, j’entends ces notes de piano comme si mes mains couraient sur le clavier ; je me sens comme si j’avais réintégré mon corps après tant d’années d’absence fantomatique. Et c’est explosif, autant de sensations qui s’entrechoquent, ça a quelque chose d’exaltant et mon corps exulte dans les sourires qui continuent d’inopiner.
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