Y’a des week ends en famille. Et puis des semaines de
boulot. Et parfois j’me demande lequel des deux j’préfère, au bout du compte.
Je t’écris parce que ça me fait du bien, et comme t’as pas vraiment l’occasion
de répondre je m’imagine que si ça t’ennuyait vraiment, tu couperais court à
tout nouveau contact. C’est un peu étrange, ce monologue, mais.
Bref. J’suis allée passer le week end en famille, et j’sais pas à quel moment
j’ai perdu ma bonne humeur. Si c’est à peine arrivée ou un peu après, toujours
est-il que j’ai abandonné une partie de mes sourires – pas toujours vrais,
j’admets – au milieu du marasme ambiant. Entre ma petite sœur qui me raconte
que l’an dernier, ma mère a pété un plomb au point de l’attraper par les
cheveux et de lui taper la tête contre la gazinière (si si, véridique, j’savais
qu’il y avait de la folie dans l’air, mais j’pensais pas que c’était à ce
point) et les engueulades permanentes, c’était plutôt sympa. Quand j’vois ça
j’suis presque heureuse de ne pas avoir plus de vacances.
Ouais. J’sais pas trop quoi faire, quoi penser, deux jours et j’suis devenue
perplexe. Ma mère a clairement exprimé qu’elle restait avec mon beau père pour
l’argent – non mais, je te dis, c’est la grande classe – et j’suis malheureuse
pour lui, parce que je l’aime énormément.
J’ai passé un week end avec des gens malheureux, alors qu’ils ont tout pour
eux. Une belle maison, un chouette boulot, une famille. Les chiens et la
piscine. Enfin, j’ai vu des gens qui passent leur temps à se pourrir plutôt
qu’à profiter de ce qu’ils ont et une fois rentrée ici, chez moi, j’étais à la
fois très soulagée et très triste. Ouais, j’aurais aimé avoir quelqu’un à qui
raconter tout ça...
Je pense à toi, encore ; tu sais j’me suis toujours dit la limite entre la passion et quelque chose de plus pérenne n’est jamais claire, et j’avais pensé, tu sais, que ça passerait avec ce temps, malgré tous ces mots. Et puis, non.
En fait, non, ça passe pas du tout tu vois. Il y a toujours toi, et j’me sens toute débile un peu.
J’suis en train de
faire un peu de ménage dans le passé, planifier une session récupération de mes
affaires chez mon ex, tout ça, parce que quand j’ai emménagé à lyon j’ai laissé
une partie de mon bazar dans sa cave à grenoble (genre toutes mes fringues d’été,
et là j’meurs carrément de chaud c’est plus possible !). J’sais pas trop
comment ça va se passer, on ne s’est pas reparlé depuis des mois.
Et puis en même temps j’vois mon contrat qui va s’achever, là d’ici peu, en fait on n’a pas re-évoqué le fait que je reste ou non, ça veut dire que 1 elle est vraiment à l’arrache et 2 si il faut dans trois semaines j’ai plus d’boulot ! je le vis de façon étrangement calme, étrangement parce que ça m’ressemble pas de me faire autant confiance et de me dire que ça va le faire, et pourtant j’en suis convaincue. Et puis j’pense que j’pourrais être libre, suffisamment libre pour arriver jusqu’à toi au moins pour quelques jours. Ouais, j’pense à ça et j’t’en parle pas enfin, j’veux dire, si, j’suis en train de le faire là. Même si j’sais pas trop ce que tu pourrais penser, j’sais pas vraiment comment tu le sens toi… Ca te dirait une ptite visite ?
Il y a une nuit la semaine dernière, j’ai fait un cauchemar, j’me suis réveillée super mal, la gorge serrée et le visage plein de larmes.
Tu étais là, j’étais chez toi, y’avait tes potes, et puis à
un moment on s’est retrouvés seuls, tu avais l’air sombre, je t’ai demandé ce
qui se passait, tu m’as répondu juste « ça s’arrête là. ». J’t’ai
demandé quoi, pourquoi, là maintenant, et tu m’as dit mais c’est toi, rien
d’autre, c’était juste moi le problème. Alors j’suis partie, j’savais pas trop
où j’étais, j’étais dans un endroit que j’connaissais pas, j’ai marché beaucoup
et puis j’ai fini par revenir où on était au début, t’étais tjs là avec tes
potes, y’avait une piscine intérieure, c’était classe, j’suis juste entrée, j’ai
plongé et puis j’suis repartie, alors j’sais pas comment ni pourquoi mais tu as
fini par me suivre et me chercher, me dire que j’pouvais pas m’tirer comme ça,
tout ça, m’engueuler en me demandant ce que c’était ce numéro, qu’est ce que
j’croyais que je pouvais revenir comme ça me baigner et puis m’en aller… On
s’est retrouvés dans une sorte de funiculaire interminable, enfin j’suis montée
dedans et tu es entré juste avant qu’il parte, tu t’es assis quelques rangs
derrière, t’avais l’air furieux, moi j’pleurais. Devant moi y’avait une vieille femme qui ressemblait à
une sorcière qui tenait une bille en verre, elle était flippante, elle se
retournait pour me regarder de temps en temps…
Et voilà, c’est tout. C’était bizarre, en me levant c’était comme si tout ça avait été bien réel, j’me sentais étrangement comme si on venait de rompre, j’avais l’impression d’avoir pleuré toute la nuit…
J’sais bien que c’est dingue, tu vois, on s’connaît toujours pas, on n’est même pas ensemble, t’es à un bout du monde et moi toujours ici. J’sais même pas si tu penses à moi, parfois, même si on s’p*ke tout le temps et que j’trouve ça mignon.
C’était bizarre ce rêve.
C’est étrange tout ce qui se passe.
Ca m’a carrément remuée ce week end chez ma mère, en fait, c’est pour ça que mon message était triste. J’ai besoin d’y voir plus clair, je pense qu’aucun d’eux ne va bien là bas et j’sais pas quoi faire pour les aider. Ma mère est dingue je crois. J’dis même pas ça en l’air, j’pense vraiment qu’elle est malade. Et qu’ils se pourrissent tous mutuellement la vie. Quand j’vois ça je me dis que finalement, c’est peut être pas si mal de vivre seule, d’être seule, de n’avoir ni comptes à rendre ni rien. Mais j’comprends pas qu’on arrive à de telles extrémités ; j’comprends pas qu’on puisse s’imposer de vivre aussi malheureux juste parce qu’on n’a pas le courage de faire que ça cesse. Je ne comprends pas. Peut être qu’il y a un âge à partir duquel on cesse de croire à la possibilité du bonheur, j’sais pas, j’me demande. J’ai toujours vécu le fait d’être en couple comme une suite d’instants T que je n’ai pas envie de partager avec quelqu’un d’autre, et le jour où ce n’est plus le cas ça s’arrête, c’est tout. J’comprends pas qu’on en fasse toujours des montagnes et que ça devienne toujours aussi compliqué. Sans doute que rien n’est jamais aussi simple, même si j’arrive à me convaincre que ça l’est.
J’suis pressée que tu puisses me raconter toi, comment ça se passe, comment ça va, que tu me racontes tout.. ! J’suis curieuse de savoir où tu vis, tout ça. En attendant, je te fais plein d’bisous, et tout et tout.
Je t’embrasse,
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