Tu vois, j’peux pas m’empêcher de compter les jours, un peu. Ca s’arrête pas. Ca s’arrête pas. Et puis il faut le dire, tant que tu es loin tu es inévitablement support de tous les fantasmes, de tous les idéaux, de tous les possibles-impossibles. Ouais, faut quand même bien l’avouer. Je sais très bien que si t’étais encore ici, on aurait trouvé mille et une raison de se tourmenter, de se haïr, de s’indifférer. Peu importe : tu es là bas à deux heures d’avance, tandis que je suis ici et maintenant. Et il y a les sourires qu’on se lance, les dialogues qu’on se trouve dans nos temps insensés, les vies qu’on arrive un peu à mélanger dans nos quotidiens qui se poursuivent ; parce qu’il faut le dire, aussi, tu es ma première pensée de chaque jour, mon premier geste du matin, t’as remplacé le café-ptit déj que j’en oublie parfois de prendre. C’est fou de prendre autant de place en étant aussi loin. Ouais, c’est complètement dingue. Alors que je ne t’ai rien promis. Je ne t’attends pas, je n’arrive juste pas à faire autrement. Je ne te cherche pas, tu me tombes dessus, et quand je te cherche tu me prends toute entière. Ouais. Chronophage, et puis je ne sais quoi en –phage qui voudrait juste dire que. Tout ça, tu vois.

Alors oui, j’compte un peu les jours, en parallèle de tout ce qui continue, même si j’suis pas sûre que ça soit une bonne chose, même si j’ai peur de m’y cramer toute entière, à ton absence, puisque j’y suis à moitié camée. Ca a tout de l’insoluble instabilité ; l’absence, le désir qui s’attise, les mots qui enveniment, l’addiction qui s’installe petit à petit. Parce que oui, c’en est une. Tu deviens ma mauvaise habitude, et c’est pas tant ça qui me fait flipper que la façon dont tu cesseras de l’être.