Je ne dois rien dire. Garder le silence, rester muette. Faire l’amour sans faire l’amour, être tendre sans aimer, ou bien aimer en secret.

J’ai découvert un lieu insoupçonnable, et on était là à dominer toute la ville, en s’bécotant comme deux ados – p’t’être bien un peu plus, en fait.  J’me disais que c’était dingue, et que c’était précieux, ces moments. Des bribes d’instants qui s’enroulent à la mémoire, des secondes qui n’ont jamais existé puisqu’on doit toujours garder le silence. Et ça m’fait du bien, ces moments de paix. C’est bon, ces instants gagnés sur le quotidien, sur l’agitation ambiante. C’est comme se réveiller d’un rêve incroyablement doux, ce genre de rêve qui doit rester dans le monde des imaginaires, et qui donne un goût si particulier au réel.

Je ne sais pas pourquoi il y a tout ça autour de moi, d’un coup. Je ne sais pas. Il y a celui qui veut se réinventer dans mon aujourd’hui, et j’suis sûre que ça n’est pas ce que je veux. Il s’est invité entre mes draps, et j’aurais voulu ne pas avoir la faiblesse de coller ma solitude entre ses bras. Et puis je suis retournée travailler, et j’apprends à devenir une reine de l’évitement,  même si il y a parfois les questions auxquelles il n’y a que lui pour me répondre, alors on reste chacun sur ses gardes. C’est exactement comme je l’avais imaginé : pareil mais différent, avec cette épaisseur de plus, cette couche de vécu qu’on s’est collée par-dessus nos rapports. Même si j’peux pas m’empêcher de retenir les détails, d’apercevoir les failles, et que je n’ai pas pu faire autrement que de lui écrire quand je l’ai senti soucieux, perdu, fatigué.

Le doudou me propose d’aller faire du sport, et je me demandais. Je ne suis pas sûre que je pourrais jouer encore au couple, alors que c'est tout ce qu'il attend. J’veux juste ressentir en plein, et c’est ce qui se passe, en ce moment. J’ai la sensation de vibrer plus fort, de vivre plus intense, même si j’suis pas amoureuse ou que je le suis complètement, de tout, de chacun, même si je vis toute seule, même si j’ai à peine le temps de voir le jour. Comme si j’avais trouvé ce point d’équilibre instable sur lequel on se sent juste bien vivant, au-delà des engagements, des actes manqués, des rythmes qu’on s’impose. Alors j’voudrais juste profiter de ces moments de paix, et laisser le reste tourner, même si j’bosse à plein régime, même si je me demande, parfois, si c’est pas moi qui tourne le plus vite. Mais ça n’a aucune importance.