Le temps file à une vitesse incroyable et je ne trouve plus comment me ménager ces espaces de liberté. Il parait que je le suis, pourtant, libre. Même si je n’ai plus l’occasion de choisir ce que je veux pour mon petit déjeuner, ce que je veux pour diner, de me lever à l’heure qui me chante, de trainer pour rien, de regarder des séries de filles, de décider que ce matin j’ai envie de céréales putain de bordel de merde, parce que tous les matins à 10h avec ces pauvres tartines je crève la dalle à en bouffer mon écran, que je n’ai plus eu l’opportunité depuis des mois de fureter seule à la recherche d’une nouvelle découverte, d’un petit rien, de tomber au hasard sur un moment de pure poésie comme ce soir là, où roulant dans une rue déserte, de la grande musique en fond sonore, j’ai vu ce gamin faire de la copoeira sur un trottoir, pile dans le rythme, pile dans le ton, exactement au bon moment au bon endroit pour me toucher au plus profond du ventre, me tirer les larmes parce que c’était beau, juste, et c’est comme si j’avais redécouvert la beauté et que tout le reste était seulement futile.
Il y a des
soirs comme aujourd’hui où je n’ai tout simplement pas envie de rentrer chez
moi, malgré le froid qui engourdit les doigts, malgré l’irrésistible
perspective d’un bon film bien au chaud… J’ai pas envie de rentrer ; j’ai
pas envie de rentrer parce que ce n’est plus mon espace, parce que j’ai besoin
de solitude, parce que ce soir, je préfère la rigidité froide des classeurs
noirs bien rangés dans leurs étagères blanches et la lumière des néons pour
seule compagnie.
J’écris à
mon bureau, celui où je passe plus de 10h par jour pour gagner ma vie, ce soir
je reste, ici, on est vendredi et chacun est pressé de retrouver son week end,
sa vie que le boulot lui vole chaque jour de la semaine. Et moi, je reste ici,
j’ai froid pourtant, mais j’arrive pas à partir parce que je ne veux pas
rentrer, juste rester ici, dormir ici là sur le sol, parce que mon chez moi n’est
plus chez moi pour devenir un chez lui, et.
Il y aura sa
putain de poulpitude qui s’enroulera autour de moi, cette façon de vouloir m’embrasser,
me câliner, m’entourer comme dans une boule d’ouate ; voyez c’est comme
quand on se fout la tête sous la couette pour dormir et qu’à un moment on n’en
peut plus de ne pas respirer, voilà, c’est ça, sauf que la couette il suffit de
la soulever et puis ça tient chaud, quand même, même si ça devient irrespirable
là-dessous.
J’ai pas
envie de rentrer chez moi. Parce que oui, c’est chez moi, chez moi, chez moi.
Et que sa photo, là, elle m’exaspère parce que je la trouve moche et qu’elle se
trouve juste là, à côté de mon lit, et que sa tasse, j’m’en fous qu’elle soit
en faience et qu'elle coute peut être un bras, elle est juste affreuse.
J’ai pas
envie de rentrer chez moi parce que c’est comme s’il m’avait dépossédée du peu
que j’ai, ce petit morceau de ville de 30m² et ces 2 bestioles, avec qui on s’en
sortait plutôt bien jusqu’ici.
J’suis pas
faite pour une vie rangée. Pas pour celle-là…
"comme un oiseau dans une cage. Il a mal aux ailes..."
Une rose au paradis, René Barjavel
Commentaires :
"C’est ce que j’écrivais : tout est là depuis toujours, il suffit de se laisser traverser. Et tout, tout est tellement plus paisible ; plus paisible, et plus intense. Plus doux et plus fort, plus simple et plus heureux. Voilà ; mon quotidien, c’est beaucoup plus de paix. Beaucoup plus de sourires, si c’est encore possible ; c’est comme si d’un coup, j’avais découvert la couleur après tout une vie en noir et blanc."
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"Pour dire à quelqu'un qu'on ne l'aime pas, il faut énormément l'aimer, lui
faire confiance ! Car, lorsque nous disons à quelqu'un que nous ne l'aimons pas,
nous craignons terriblement qu'il ne nous aime plus..."