Siroter un martini. Ou l’avaler,
l’engloutir, j’en sais rien. Je ne sais pas grand-chose en fait. Pas assez mangé : je
ne prends plus que des petits déjeuners. L’alcool montera plus vite.
Remettre une situation sur
un visage ; me rappeler ces jours lointains où j’étais trop bourrée pour
trouver le portail, l’escaladais, quémandais des pâtes aux voisins, repartais
avec mon assiette, mangeais, buvais, finissais la tête dans les chiottes sans m’en
souvenir, dormais, repartais énervée, rentrais chez moi à pieds à l’autre bout
de la ville à une heure improbable. No comment. Son visage connu sur lequel je
ne sais plus coller de nom, comme pour me rappeler que cette période allait se
répéter dans ma vie à intervalles plus ou moins réguliers.
Se trouver quelqu’un ou
surtout le laisser m’approcher, baiser, s’en foutre. Penser à un idéal, rêver d’autre
chose. Croire qu’on ne se trahit pas puisqu’on n’a rien ressenti. S’imaginer
que le sexe n’est rien d’autre que ce qu’il est. N’être qu’en actes, je l’ai
déjà bien trop écrit.
Croiser encore son sourire et me dire qu'il est sans doute le plus bel homme qui partagera jamais mon chemin. Laisser espérer la vie quand je n’ai plus rien d’espoir, plus rien d’imaginaire. Trouver tout dérisoire et futile, en premier lieu ce que je suis, les désirs que je n’ai plus, mon absence totale d’utopie. Je ne suis rien, rien au monde, rien en moi-même – dérisoire, éphémère, inutile. Quel intérêt alors si ce n’est celui de laisser croire à un bonheur sans ombres quand je ne suis plus que spectre de moi-même. Tu peux aimer ton ombre, mais elle restera toujours aussi froide – elle te suivra, elle t’accompagnera toujours, mais ne ressentira rien. Voilà ce que je suis.
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